Il était le premier évêque africain à accéder à cette distinction. L’itinéraire de Bernardin Gantin au sein de l’Église catholique romaine a été exceptionnel. De son ordination comme prêtre le 14 juillet 1951, à sa disparition à Paris le l3 mai dernier, à l’âge de 86 ans, le prélat béninois a occupé de hautes fonctions qu’il a assumées avec humilité. Consacré évêque en 1957 (le plus jeune de l’histoire ecclésiale il avait 35 ans), Bernardin Gantin est nommé archevêque de Cotonou le 5 janvier 1960 (à 38 ans) le premier archevêque élu de toute l’Afrique, poste qu’il occupe pendant 11 ans. Président de
la Conférence épiscopale régionale d’Afrique de l’Ouest, il est appelé en 1971 (à 49 ans) à Rome par le Pape Paul VI à l’actuelle Congrégation pour l’évangélisation des peuples. Il est nommé cardinal par le Pape Paul VI (en même temps que Joseph Ratzinger, le futur Pape Benoît XVI) lors du consistoire du 27 juin 1977 (à 55 ans). En 1978 à la mort du Pape Jean-Paul Ier il est considéré comme un des papabiles (c’est-à -dire favoris pour succéder au Pape défunt lors du Conclave).
Si de notre vivant un humain né de l’Afrique eût pu devenir le Pape venu de ce continent-mère, c’est bien lui, Bernardin, Cardinal Gantin.
Cet homme qui a assumé les plus hautes charges au sommet de la hiérarchie de l’Église catholique actuelle, vient de la famille royale d’Abomey (Bénin, ex-Dahomey), prince de sang il est devenu prince de l’Église. Il a été le seul africain de notre histoire contemporaine à incarner ce que peut vivre de fierté et de reconnaissance un continent dans sa totale identité et dans sa contribution et sa présence au monde.
Respecté et craint pour son intelligence et sa grande autorité intellectuelle et spirituelle, mais aussi admiré pour son génie à agir avec souplesse comme un immense pasteur qui protège les siens et aussi à savoir prendre des décisions et mettre en œuvre de grands projets avec fermeté, donnant ainsi plein sens à son nom qui en langue Fon veut dire Gan « fer » Tin « arbre », savant métissage d’ouverture et de compréhension, de fidélité aux principes de l’Église et de complicité avec les cultures, les particularités ancestrales propres aux peuples qui composent la grande famille des croyants.
A Cotonou, certains l’appelaient « le sage dans la tempête » ou encore « la lumineuse intelligence chrétienne ». Ceux qui ont connu Bernardin Gantin louent son incroyable mémoire, sa délicatesse légendaire et son humilité. Après trente ans de cardinalat, cette figure de l’Église catholique devrait finir ses jours à Rome, avec les honneurs dus à son rang. Cependant, en 2002, il a préféré rentrer chez lui « comme un missionnaire romain en Afrique ». Solide comme un roc, cet homme à l’allure sportive a conservé, en près de soixante-dix ans de vie active, au service de la communauté des croyants de tous horizons et plus spécialement de la foi catholique, une énergie, un sens critique permanent, une curiosité intellectuelle et un optimisme généreux sans faille.
« Je suis revenu ici à Cotonou en 2002. Et j’ai fait ce choix pour prier, pour aider de ma présence et de ma prière les évêques de mon pays », disait-il souvent aux journalistes du monde qui l’interrogeaient sur les difficultés de la pratique religieuse sur le continent africain dans un contexte où l’Islam et les sectes semblent progresser : « J’ai vécu hors de mon continent pendant trente et un ans. Pendant cette période l’Afrique n’est pas restée immobile. Il faut dire, pour être juste, qu’il y a eu une amélioration des conditions de vie moyennes. Cela, il faut le reconnaître. Et de cela nous rendons grâce au Seigneur».
À propos des mécanismes et des termes de l’échange entre pays plus riches et de nombreux États africains, notamment en ce qui concerne l’acheminement de l’aide dans les cas de crises, la réponse du cardinal est directe : « Mais je crois malgré tout que la voie la plus efficace est celle des Églises, ne serait-ce que parce que, dans ce cas, il est plus facile de contrôler et de vérifier que les biens vont effectivement à ceux à qui ils sont destinés et qu’ils ne servent pas à entretenir l’odieux mécanisme de la corruption. Car la corruption est malheureusement très développée sur notre continent ». Mon grand oncle a vraiment vécu dans la simplicité des moyens, sans chercher à accumuler quelque richesse et ses derniers mots, répondant à quelqu’un qui avait vu sa vie modeste au pays, ont été : « Matériellement, je n’ai plus rien. C’est mieux ainsi! Cette pauvreté matérielle m’aide à mieux vivre la pauvreté spirituelle, ce détachement indispensable à la disponibilité du cœur et de l’esprit pour l’essentiel ».
Quelques dates :
8 mai 1922 : Naissance à Cotonou (ex-Dahomey, aujourd’hui Bénin)
1936 : Entrée au séminaire
14 juillet 1951 : Ordonné prêtre à 29 ans Dès 1956 : À 34 ans, Pie XII le nomme évêque coadjuteur de Cotonou.
1959 : Archevêque de Cotonou (à 37 ans)
1960 : Le premier archevêque métropolitain (38 ans) de toute l’Afrique, Président de la Conférence épiscopale d’Afrique occidentale francophone (Cerao)
1962-1965 : Participant du concile Vatican II, sous sa sainteté Jean XXIII, il a 40 ans.
1971 : Paul VI le nomme à Rome à la Congrégation pour l’évangélisation des peuples, il a 49 ans.
27 juin 1977 : Le pape Paul VI, le crée Cardinal (à 55 ans) lors du Consistoire, en même temps que le Cardinal Joseph Ratzinger, futur Benoît XVI.
1978 : Mort de Jean-Paul Ier le cardinal Gantin est considéré comme un Papabile. Il a 56 ans.
Le 8 avril 1984 : Le Pape Jean-Paul II le nomme Préfet de la congrégation des évêques au Vatican (62 ans).
1993 : Doyen du collège des cardinaux (à 71 ans).
2005 : Il participe au Conclave, mais sans droit de vote car il atteint le limite d’âge, il a alors 83 ans.
8 mai 2008 : Il a 86 ans.
13 mai 2008 : Décès à Paris. Il a 86 ans.
En conclusion : Sous la responsabilité de monsieur l’Abbé Jean Clotaire Bocco, originaire du Bénin, plusieurs prêtres ont concélébré une messe en hommage au Cardinal Bernardin Gantin, dimanche 25 mai 2008, à 17 h 00 en l’église Saint-Germain d’Outremont.